Le comptable compte, le manouvrier manoeuvre, le dramaturge dramatise, l'ingénieur s'ingénie, le romancier romance et l'imbécile, lui,...

L'imbécile compile
.

En marge :

J'accuse...!

(Où l'on spécule sur la notion d'erreur judciciaire)

V. De la prévention de la récidive : le cas Francis Evrard

Angélique Négroni scribebat :

“Magistrats et experts ont dû s'expliquer mercredi sur les dysfonctionnements qui ont profité au pédophile.

Estampillé en prison "dangereux pédophile pervers susceptible de récidiver" par les experts, Francis Evrard n'est plus du tout stigmatisé une fois libre. Tous les clignotants s'éteignent brusquement. Et cela au moment où, en rejoignant la société, il est bien plus redoutable que lorsqu'il était derrière les barreaux.

Tels sont les terribles dysfonctionnements qui sont apparus mercredi au troisième jour du procès de ce multirécidiviste jugé pour le viol du petit Enis, un garçonnet de 5 ans, devant les assises du Nord à Douai. Un crime commis le 15 août 2007, six semaines après sa sortie.

Le 2 juillet, en plein été qui dégarnit les services judiciaires, cette sortie est tout simplement passée inaperçue. Pour éviter la récidive, ce pédophile devait pourtant subir un traitement anti-hormonal assorti d'un suivi psychologique. La suite est connue : l'ancien détenu ne verra aucun médecin et s'en prendra à un enfant.

Et la cour d'égrener les manquements judiciaires. L'ex-détenu, quittant la prison de Caen pour s'installer à Rouen, son dossier le suit et passe d'un tribunal à l'autre. Or il n'atterrit que le 16 juillet sur le bureau d'une juge d'application des peines de Rouen. Valérie de Saint-Félix a été longuement entendue mercredi à la barre comme témoin. Le dossier lui est communiqué l'après-midi de ce 16 juillet. Mais la juge est partie en vacances depuis 12 heures…

Cette magistrate de 41 ans, assommée de questions à l'audience, déclare : "J'observe que le dossier n'a pas suivi un parcours normal et conforme à la pratique." Pour elle, son homologue de Caen aurait dû lui "signaler le caractère sensible" de l'affaire. Ce manquement est irrécupérable. Le magistrat qui remplace Valérie de Saint-Félix durant ses congés ne se préoccupe pas de Francis Evrard. Ce dernier, qui ne va pas de lui-même pousser la porte d'un hôpital pour se soigner, n'est pas rappelé à l'ordre. "Je suis revenue de vacances le 13 août", poursuit Valérie de Saint-Félix. "Mais j'avais des audiences, du courrier…" , se justifie-t-elle. Le cas du pédophile n'est toujours pas étudié.

Et tout se télescope. Le 15 août, l'alerte enlèvement est déclenchée, le petit Enis est enlevé, agressé et retrouvé vers minuit. Le 16, l'affaire fait la une de tous les journaux. Le même jour, la magistrate fait enfin partir une convocation de Francis Evrard pour le 24 août… "Je sais, il y a une coïncidence sur les dates", bredouille la juge, malmenée par Me Olivier Morice, partie civile, et représentant l'association Innocence en danger. Ce dernier note "des erreurs matérielles dans la convocation qui laissent à penser qu'elle a été rédigée dans la précipitation" . Mais droite à la barre, Valérie de Saint-Félix se défend d'avoir voulu rattraper un terrible ratage. Une allégation que Me Jérôme Pianezza, conseil de l'accusé, a du mal à croire. Ce dernier rappelle que ce 16 août 2007, la France entière connaît l'affaire. "J'avais juste entendu l'alerte enlèvement la veille mais je ne savais pas qu'il s'agissait de Francis Evrard", se défend encore la juge, laissant entendre que d'autres fonctionnaires également chargés du suivi de l'ancien détenu auraient pu aussi s'activer. Pour elle, les mesures de soins auraient pu se mettre en place sans sa convocation.

Or le personnel du service pénitentiaire d'insertion et de probation (SPIP) de Rouen visé par cette déclaration a cru bien faire. Entendant les règles de droit autrement, il attendait justement d'être saisi par la juge pour agir. Pourtant, le 10 juillet 2007, Francis Evrard pousse la porte de leur service quelques jours après sa sortie. Mais l'entretien tourne court. Le dossier "Evrard" que devait transmettre le SPIP de Caen à celui de Rouen n'arrive que le 18 juillet. Du coup, Frédérique Clément, une conseillère qui accueille l'ancien détenu ce 10 juillet, ne sait pas à qui elle a affaire et n'aborde pas avec lui les problèmes de soins. "Je regrette que l'on ne nous ait pas indiqué qu'il s'agissait d'un dossier particulier", signalait peu avant sa responsable à la barre.

Sans cette incroyable inertie des services, le petit Enis aurait-il pu échapper à son agresseur ? Le défenseur de l'accusé semble en être convaincu. Pour Me Morice, on en a "limité les chances". Avec un suivi tout particulier le concernant, Francis Evrard qui n'a même pas tenté de se soigner, aurait pu sans doute retourner très vite en prison comme le prévoit la loi. Mais s'il avait voulu suivre un traitement psychiatrique, il aurait dû attendre deux mois, en raison d'une pénurie de spécialistes dans la région. Encore un dysfonctionnement de plus...”

(Angélique Négroni, « La justice en accusation au procès de Francis Evrard » in Le Figaro, mercredi 28 octobre 2009, lefigaro.fr/...)

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