Le comptable compte, le manouvrier manoeuvre, le dramaturge dramatise, l'ingénieur s'ingénie, le romancier romance et l'imbécile, lui,...

L'imbécile compile
.

En marge :

Entité : CNDS

II. De l'établissement des faits par la Commission nationale de déontologie de la sécurité

Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité scribebat :

“La Commission nationale de déontologie de la sécurité a été saisie, le 6 août 2007, par M. Daniel VAILLANT, député de Paris, des conditions de la verbalisation, de la conduite au commissariat du 17ème arrondissement de Paris de M. M.K. et de sa retenue afin de procéder à une vérification d’identité, le 24 avril 2007. Elle a entendu M. M.K. et M. R.L., gardien de la paix.

> LES FAITS

Le 24 avril 2007, à 1h40, M. M.K. a stoppé son véhicule à l’angle d’une avenue et d’une rue du 17ème arrondissement de Paris. Il a mis en fonction les feux de détresse et éteint le moteur de la voiture. Il venait en effet de ressentir un malaise. Il est sorti de son véhicule pour faire quelques pas et respirer un peu.

Un équipage de policiers à bord d’une voiture sérigraphiée s’est porté à la hauteur du véhicule qui était stationné sur une voie de bus et devant une épicerie ouverte la nuit. Les policiers ont aperçu une personne se diriger vers ce véhicule avec une clef de voiture dans une main et un sac plastique transparent contenant une bouteille de lait dans l’autre. Les policiers lui ont demandé, sans descendre de leur propre véhicule, de quitter les lieux immédiatement afin de mettre fin à l’infraction.

M. M.K. affirme que les policiers lui ont adressé la parole sur un ton qui n’était pas aimable et il leur a demandé de parler d’une façon plus respectueuse. Selon lui, les policiers n’auraient pas apprécié cette remarque et cela aurait motivé leur descente du véhicule pour procéder à sa verbalisation.

Le gardien de la paix R.L., interrogé par la Commission, affirme de son côté que M. M.K. s’est immédiatement emballé dans un discours assez confus en élevant la voix. Le procès verbal d’interpellation transmis à la Commission en cours d’audition du fonctionnaire mentionne : « L’individu se met à vociférer à notre encontre, nous indiquant que l’on avait aucun droit de lui dire ce qu’il devait faire, qu’il n’était pas en infraction puisqu’il avait actionné les quatre feux clignotants et que, de toute façon, lui connaissait la loi. »

M. M.K. est ensuite remonté dans son véhicule et a mis le moteur en route. Les policiers se sont alors portés à sa hauteur et lui ont demandé de présenter les pièces afférentes à la conduite et à la circulation du véhicule. M. M.K. voyant qu’il ne pouvait quitter les lieux a stoppé le moteur mais a refusé de présenter les documents demandés.

S’ensuit un échange au cours duquel M. M.K. affirme avoir été insulté, les policiers lui auraient parlé durement. De leur côté, les agents interpellateurs décrivent M. M.K. comme étant surexcité et criant. M. M.K. maintenant son refus catégorique de présenter ses documents et ce malgré la présence d’un officier venue les rejoindre, les policiers ont décidé de procéder à son interpellation. Après avoir subi une palpation de sécurité et avoir été menotté, M. M.K. a été transporté au commissariat du 17ème arrondissement. Les documents d’identité de M. M.K. ont été découverts à l’intérieur de son portefeuille. M. M.K. n’a pas été placé en garde à vue. A 2h30, il a été entendu par un agent de police judiciaire. Durant les différents temps d’attente au commissariat, M. M.K. était menotté à un banc. Il a été libéré du commissariat vers 5h00 du matin.

> AVIS

Concernant la communication des pièces de procédure :

A deux reprises, par courrier en date du 22 octobre 2007 et par téléphone au mois de décembre 2008, la Commission s’est adressée aux services de la préfecture de police de Paris afin d’obtenir communication des pièces de la procédure concernant le contrôle d’identité de M. M.K. Dans sa réponse en date du 14 janvier 2009, le préfet de Police écrit : « Je vous informe qu’après vérifications auprès du commissariat du 17ème arrondissement, il n’a pas été trouvé trace de la procédure. »

Si la Commission n’ignore pas que ce type de procédure est détruit dans un délai de six mois, elle constate, d’une part, que ce délai n’était pas expiré lors de sa première demande et s’étonne, d’autre part, que le fonctionnaire, entendu dans le cadre de l’examen de cette saisine, soit parvenu à obtenir et produire lors de son audition en date du 7 juillet 2009 une partie des pièces de la procédure qui aurait dû être détruite (procès-verbaux d’interpellation et d’audition).

[...]

Concernant les droits afférents à la retenue au commissariat pour une vérification d’identité :

[...] M.K. affirme avoir demandé à deux reprises de pouvoir faire aviser son amie et que cela lui aurait été refusé.

En l’absence de communication des pièces de la procédure, la Commission n’a pas été en mesure de s’assurer de la réalité de la notification du droit de faire aviser un proche.

> RECOMMANDATIONS

La Commission souhaite que les termes de l’article 5 de la loi du 6 juin 2000 soient rappelés au préfet de police de Paris et en particulier l’obligation pour les autorités publiques de « prendre toutes mesures pour faciliter la tâche de la Commission [et de communiquer] à celle-ci, sur sa demande motivée, toutes informations et pièces utiles à l’exercice de sa mission. »

[Pièce jointe : Du Directeur du Cabinet du Préfet de Police, Christian Lambert, au Président de la CNDS, 31 décembre 2009:] Concernant le fait que le gardien de la paix R. L. ait produit, lors de son audition du 7 juillet 2009 par la CNDS, des procès verbaux relatifs aux conditions d'interpellation et d'audition de M. K., cette action repose sur une initiative personnelle de l'intéressé qui contrevient à l'article 78-3 du code de procédure pénale. Ce fonctionnaire a été entendu sur ces faits et s'est vu notifié [sic] une lettre de mise en garde.”

(Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité, Avis et recommandations au regard de la saisine n°2007-93 concernant les conditions de la verbalisation, de la conduite au commissariat du 17ème arrondissement de Paris de M. M.K. et de sa retenue afin de procéder à une vérification d’identité, 18 janvier 2010, cnds.fr/...)
Céans, le vendredi V février MMX

Cet avis a été sélectionné arbitrairement parmi les dernières publications (Assemblée plénière du 18 janvier 2010) de la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS). Même s'il n'est pas nécessairement représentatif, il témoigne d'un rapport ambigu aux sources permettant d'établir les faits.

> LES FAITS ?

Les avis et recommandations de la CNDS sont découpés en trois parties : les faits, avis, recommandations. Cela coule de source, nul ne peut exprimer d'avis, sur lequel se basent ses recommandations, sans savoir sur quoi porte cet avis.

Sur le principe : lorsque les faits correspondent à une vérité judiciaire, à une chose jugée, la CNDS n'a théoriquement d'autre choix que de coller à cette vérité, faute de quoi elle serait suspecte d'avoir publiquement cherché à jeter le discrédit sur un acte ou une décision juridictionnelle, dans des conditions de nature à porter atteinte à l'autorité de la justice ou a son indépendance, un fait puni par le Code pénal dans son article 434-25 ; dans l'alternative où les faits n'ont fait l'objet d'aucun jugement -ni condamnation, ni relaxe-, la présomption d'innocence impose la modération et, en conséquence, l'expression les faits devrait être proscrite.

Sur le cas présent : les faits allégués constituent un récit incohérent, nous devinons qu'il s'agit d'un amalgame entre versions contradictoires. La transition entre la séquence catastrophe, où le nommé M.K. n'a d'autre choix, pour sa sécurité, alors qu'il ressent un malaise, que de stopper son véhicule dans une voie de bus juste devant une épicerie, puis celle anodine, où le même M.K. ressort de cette épicerie où il vient de faire des emplettes, laisse le lecteur attentif dubitatif. La première partie provient indubitablement de M.K., lui seul pouvant avoir connaissance de cette épisode. Pourquoi laisser un vide entre le moment où M.K. se sent si mal qu'il fait le choix de stopper son véhicule au plus proche et le moment où il décide, finalement, d'aller faire des emplettes à l'épicerie à proximité, sans cependant prendre garde à stationner régulièrement son véhicule ? Pourquoi laisser un flou sur le seul moment qui importe dans cette phase du récit, c'est à dire le moment où M.K. fait le choix de laisser son véhicule stationné irrégulièrement, après l'épisode du malaise et avant celui des emplettes ?

S'il est judicieux que les publications de la CNDS débutent par un rappel des faits, nous pourrions recommander que soient clairement identifiées les sources de chaque allégation discutable. Ainsi, au lieu d'écrire « M.K. venait en effet de ressentir un malaise », il devrait apparaître « M.K. affirme qu'il venait en effet de ressentir un malaise ».

> LA COMMUNICATION DES PIÈCES DE PROCÉDURE

Dans cette affaire, il y a deux infractions pénales : une contravention de stationnement irrégulier et le délit de refus pour un conducteur de se soumettre à toutes vérifications prescrites concernant son véhicule ou sa personne (L233-2 du code de la route, puni de trois mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende). Selon ce que nous pouvons en comprendre, le délit n'a pas été poursuivi, M.K. n'ayant pas été interpellé pour ce fait mais ayant été conduit au poste de police pour une vérification d'identité. En droit, cela signifie qu'au lieu de constater ce délit flagrant (article 53 du code de procédure pénale) puis d'appréhender son auteur (article 73 du même code), les policiers ont pris le parti de faire un contrôle d'identité pour identifier l'auteur d'une infraction (article 78-2 du même code) leur imposant de faire recours, ensuite, à la procédure de vérification d'identité (article 78-3 du même code). Les deux approches sont fondées en droit, impliquent les mêmes actes sur la voie publique : autant dire que le choix d'une procédure ou d'une autre, la seconde étant largement plus clémente pour le mis en cause et rapide pour les policiers, a pu se faire une fois les policiers arrivés au poste.

Ce choix a une conséquence importante au long terme, l'article 78-3 du code de procédure pénale dispose que « si elle n'est suivie à l'égard de la personne qui a été retenue d'aucune procédure d'enquête ou d'exécution adressée à l'autorité judiciaire, la vérification d'identité ne peut donner lieu à une mise en mémoire sur fichiers et le procès-verbal ainsi que toutes les pièces se rapportant à la vérification sont détruits dans un délai de six mois ». De ce fait, seul un policier interpellateur, ayant ignoré cette règle de procédure, s'est trouvé en possession du procès verbal d'interpellation ainsi que celui de son audition ultérieure. Il est remarquable, d'ailleurs, qu'une vérification d'identité ait donné lieu à un procès-verbal d'audition du policier interpellateur. Cette procédure n'ayant pas vocation à déboucher sur des poursuites -mais bien à identifier une personne-, il y a lieu de se demander à quelle(s) question(s) cette audition devait-elle répondre. Se pose, de même, la question de savoir s'il est répréhensible pour un policier de conserver le procès-verbal de sa propre audition, dont il reçoit copie comme n'importe quelle autre personne entendue.

La Préfecture de police ayant failli à communiquer les pièces de procédure à la CNDS, c'est finalement les archives personnelles et illégales, au moins en partie, d'un policier interpellateur qui y ont remédié. Le remerciement s'est fait sous la forme d'une lettre de mise en garde émise par la Préfecture de police à l'encontre de son fonctionnaire, en conséquence des recommandations et de l'avis de la CNDS. Car si la CNDS recommande que soit rappelé au Préfet de police « l’obligation pour les autorités publiques de prendre toutes mesures pour faciliter la tâche de la Commission [et de communiquer] à celle-ci, sur sa demande motivée, toutes informations et pièces utiles à l’exercice de sa mission », elle « s'étonne » dans son avis « que le fonctionnaire [...] soit parvenu à obtenir et produire [...] une partie des pièces de la procédure qui aurait dû être détruite ».

> RECOMMANDATIONS

Il est souhaitable que soit rappelé à la CNDS qu'elle n'est pas fondée à établir la vérité judiciaire (plus en détail : riesling.free.fr/...). Ansi, il serait judicieux, a minima, qu'elle renomme la partie Les faits en Les faits allégués.

De même, afin de faciliter une éventuelle action postérieure de la Justice ou de la Commission, une réflexion devrait être engagée sur la possibilité d'autoriser les policiers et gendarmes à conserver les procès verbaux dont ils sont signataires faisant état d'usage de la coercition -ou tout autre acte de leur part pouvant être considéré comme une infraction pénale si détaché de l'ordre de la loi, du commandement de l'autorité légitime, de l'état de nécessité ou tout autre fait justificatif/cause de non imputabilité-, et ce uniquement si la procédure dans laquelle ils ont place n'a fait l'objet d'un jugement. Les policiers et gendarmes sont déjà astreints au secret professionnel, il n'est donc pas à craindre que ces archives soient communiquées hors du cadre judiciaire ou disciplinaire. Il s'agit des professions exposées, il n'est pas insensé de faciliter, à leur endroit, l'exercice des droits de la défense.

#? > Réagir :

Pseudonyme, nom :

Adresse (URL ou courriel) :

Commentaire :

Sur le même thème

Thèmes en relation

         Mais que fait la police ?       Nul n'est responsable que de son propre fait ?
     100 Centre Street