Le comptable compte, le manouvrier manoeuvre, le dramaturge dramatise, l'ingénieur s'ingénie, le romancier romance et l'imbécile, lui,...

L'imbécile compile
.

En marge :

Entité : Cour de cassation

I. De la responsabilité pénale du poursuivant des auteurs d'infrations

Cour de cassation scribebat :

“REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

REJET du pourvoi formé par X... Pierre, contre l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans, chambre correctionnelle, en date du 1er avril 2003, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef d'homicide involontaire, l'a déclaré coupable en le dispensant de peine et qui a prononcé sur l'action civile.

LA COUR,

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6.3, c) de la Convention européenne des droits de l'homme, 460, 513 et 591 du Code de procédure pénale, violation des droits de la défense :

" en ce qu'il ne résulte pas des énonciations de l'arrêt attaqué que Pierre X... ou son avocat ont eu la parole en dernier ;

" alors que le principe selon lequel le prévenu ou son conseil doivent toujours avoir la parole les derniers s'impose à peine de nullité ; que, dès lors, l'arrêt attaqué, dont les énonciations ne permettent pas à la Cour de cassation de s'assurer que Pierre X..., ou son conseil Me Siecklucki, aient été entendus en dernier, a violé le principe susvisé " ;

Attendu que l'arrêt attaqué mentionne qu'ont été successivement entendus l'avocat des parties civiles, le ministère public, l'avocat de Pierre X..., prévenu non comparant, l'avocat de l'autre prévenue, Anne X..., celle-ci ayant eu la parole en dernier ;

Attendu qu'il résulte de ces mentions que l'avocat de Pierre X... a eu la parole le dernier pour présenter la défense de son client ;

Qu'ainsi le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 122-4 et 221-6 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Pierre X... coupable d'homicide involontaire sur la personne d'Yves Y... ;

" aux motifs que Pierre X... a manifestement manqué à la plus élémentaire des prudences en conduisant lui-même son véhicule à contresens à vive allure, ce qui a contribué à la mise en danger d'autrui ; qu'aux termes de l'article 122-4 du Code pénal, n'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par les dispositions législatives ou réglementaires ou commandé par l'autorité légitime sauf si cet acte est manifestement illégal ; qu'en l'espèce, Pierre X... a franchi la ligne médiane, a circulé dans un couloir de circulation qui n'était pas le sien, et a ainsi commis des actes manifestement illégaux qui ne peuvent se rattacher ni à la loi ni au commandement de l'autorité légitime ; qu'il a pris un risque disproportionné pour mettre un terme aux infractions commises par Anne X... ;

" alors que n'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par les dispositions législatives ou réglementaires ; que Pierre X... démontrait qu'il ne pouvait être déclaré pénalement responsable dès lors que la légitimité de la décision de mettre un terme au comportement dangereux et répréhensible d'Anne X... résidait dans la mission de sécurité lui étant légalement impartie en sa qualité d'officier de police judiciaire, de sorte que l'ordre donné en ce sens par son supérieur hiérarchique, Yves Y..., se trouvait être parfaitement légal ; qu'ainsi, en se bornant à examiner la responsabilité du demandeur au regard des seules conséquences découlant nécessairement de la décision de mettre un terme à la course folle d'Anne X... compte tenu de la trajectoire empruntée par cette automobiliste, sans rechercher si une telle décision, en elle-même, n'obéissait pas aux prescriptions légales en la matière, conférant à l'ordre donné un caractère obligatoire, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt et des pièces de procédure que, le 21 mars 1996, vers 20 h 30, à Tours, deux gendarmes de la brigade rapide d'intervention de l'autoroute A 10, Pierre X... et Yves Y..., qui partaient en mission de surveillance dans un véhicule conduit par le premier, ont constaté qu'une automobile, roulant tous feux éteints, venait de franchir un feu rouge ; qu'ils ont décidé de poursuivre ce véhicule, conduit par Anne X..., qui a accéléré, jusqu'à atteindre la vitesse de 100 km/heure et qui a franchi la ligne médiane continue pour rouler à contresens de la circulation ; que, pour éviter un choc frontal, la conductrice s'est déportée sur la gauche dans la voie réservée aux autobus ; que le conducteur du véhicule de gendarmerie, qui suivait de très près celui poursuivi, s'est rabattu sur la droite pour éviter à son tour la collision ; qu'il a perdu le contrôle de son automobile qui a percuté un arbre ; qu'Yves Y... a trouvé la mort et que Pierre X... a été grièvement blessé ;

Attendu que, par arrêt de la cour d'appel d'Orléans du 16 juillet 1998, Anne X... a été condamnée pour mise en danger d'autrui et contraventions au code de la route ; qu'à la suite de la plainte avec constitution de partie civile d'Annie Z..., veuve d'Yves Y..., et de Pierre X..., contre Anne X..., du chef d'homicide et blessures involontaires, celle-ci, ainsi que Pierre X..., ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel, qui les a déclaré coupables dispensant de peine le second ;

Attendu que, pour confirmer les dispositions du jugement retenant la culpabilité de Pierre X... du chef d'homicide involontaire, en écartant son argumentation, qui invoquait la cause d'irresponsabilité pénale prévue par l'article 122-4 du code pénal, l'arrêt relève que le prévenu, en adaptant sa conduite automobile à celle particulièrement dangereuse d'Anne X..., lui-même franchissant la ligne médiane continue et roulant à contresens de la circulation, a pris un risque disproportionné à l'obligation de mettre un terme aux infractions constatées, en commettant des actes manifestement illégaux, qui ne peuvent être justifiés ni par la loi ni par le commandement de l'autorité légitime ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui caractérisent un comportement faisant obstacle à l'application de l'article 122-4 du Code pénal, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi.”

(Cour de cassation, pourvoi 03-82852, audience publique du 23 mars 2004, legifrance.gouv.fr/...)
Céans, le samedi XXIII janvier MMX

Je ne comptais pas m'emparer du sujet de l'accident tragique de Woippy, où trois individus montés sur un même cyclomoteur, vraisemblablement volé, roulant sans feux, ont chuté alors qu'ils étaient poursuivis par des policiers municipaux (lefigaro.fr/...). Le sujet est prodigieusement banal et appelé à se reproduire de Woippy à Bagnolet, en passant par Dammarie-lès-Lys, Montpellier, etc. Et, à chaque occasion, le même débat se posera. Il s'agira de déterminer à partir de quel moment il est judicieux de cesser toute poursuite -au sens policier comme au sens judiciaire du terme- d'un auteur d'infractions. J'ai déjà pris part à ce débat, avec à l'appui les exemples de Dammaries-lès-Lys en 2002, Montpellier en 2006, Saint Fons en 2007 ou encore Clichy-sous-Bois en 2005 (riesling.free.fr/...) : en cyclomoteur, en voiture, à pied ou à cheval, en bateau à voile ou à vapeur, nous sommes dans une période d'omni-responsabilisation de l'État et, donc, de ses fonctionnaires. C'est le corollaire d'un esprit de deresponsabilisation des individus, faisant mentir le principe judiciaire que nul n'est responsable que de son propre fait. Le droit restant en l'état, des accusations portées à tout crin par les conseils (les mêmes noms reviennent, Jean-Pierre Mignard ou encore William Bourdon) des familles des dites victimes ne découle aucune condamnation en rapport. Mais la vague médiatique est là, le vent la porte, et elle n'est pas neutre de conséquences immédiates pour les policiers et gendarmes qu'elle cloue au pilori.

Lire Georges Moreas, commissaire de police honoraire (comprendre retraité), expérimenté en investigation plutôt qu'en voie publique, se référer à cet arrêt de la cour de cassation (qu'il considère étrangement comme un jugement sur le fond) pour se demander s'il « est raisonnable, pour un simple contrôle routier, de lancer un 4X4, sirène hurlante, derrière un scooter, à 1h20 du matin, en plein centre d’une petite commune de 14 000 habitants » (moreas.blog.lemonde.fr/...) invite toutefois à commentaire. Est-il vraiment raisonnable de penser que cette jurisprudence éclaire plutôt qu'elle n'obscurcit le débat présent ?

Sur les circonstances des faits, dans les deux cas de figure, se trouvent des policiers confrontés à un comportement manifestement dangereux à l'occasion de la conduite de véhicules terrestres à moteur. Mais la comparaison s'arrête là.

Ce qui est reproché au gendarme Pierre X. réside dans le fait d'avoir perdu le contrôle de son véhicule en effectuant une manoeuvre dangereuse, à savoir le fait de rouler en contresens. En aucun cas il est dit qu'il était pas justifié de poursuivre l'automobile Anne X., il est dit qu'en l'espèce, les risques pris par Pierre X. imitant ceux considérables pris par Anne X. étaient disproportionnés, lui faisant de ce fait perdre le bénéfice de l'irresponsabilité pénale prévue par l'article 122-4 du code pénal. Précisément, Pierre X. est condamné pour homicide involontaire pour sa conduite, son propre fait.

Or, à Woippy, selon les informations révélées publiquement, les policiers n'ont fait aucune erreur de conduite, rien n'indique qu'ils ont personnellement pris des risques ou fait directement courir des risques à autrui à l'occasion de la conduite de leur véhicule. Le seul reproche qui leur est fait est le fait d'avoir poursuivi les auteurs d'infraction, ce qui ne correspond certainement pas à une infraction pénale mais plutôt à l'obligation statutaire des policiers d'intervenir pour faire cesser tout comportement dangereux dont ils sont témoins.

Cette jurisprudence est donc hors de propos concernant les évènements de Woippy puisqu'elle s'inscrit dans la logique de la notion responsabilité individuelle traditionnelle. Elle rappelle que les policiers et gendarmes, à l'occasion de la conduite de véhicules, pour leur missions, ne peuvent s'affranchir du code de la route qu'à la condition qu'ils ne font pas courir, avec leur propre automobile, de risques disproportionnés à autrui. Elle ne dit aucunement que les policiers n'ont pas le droit de faire de mouvement rapide en direction d'un délinquant afin de l'appréhender. Il ne s'agit pas de la condamnation d'un policier pour l'entorse au pied que ce serait fait un délinquant qui aurait fait un faux pas en apercevant ledit policier.

Question subsidiaire : un fonctionnaire de police qui, constatant qu'un individu prend la fuite à sa vue, ne s'élance pas à sa poursuite est-il un policier ou un fonctionnaire ?

#1 > Le dimanche 7 février 2010 à 14h11 par Enclume des Nuits :

Laurent Mucchielli s'exprime sur son blog (sur lequel il est impossible de poster des commentaires) : <lien>

On note en particulier :
« La quasi-totalité des commentaires des journalistes ont relayé les communiqués institutionnels précisant que le scooter était volé et que les jeunes étaient "défavorablement connus des services de police". Dans la bataille de la communication, cela s?appelle déconsidérer l?ennemi. On rappellera pourtant qu?au moment de la nuit où ils ont entamé la course-poursuite, les policiers municipaux ne pouvaient pas savoir
tout cela. Ils ont donc poursuivi des jeunes qui roulaient simplement sans casque. »

Par définition, si des personnes sont défavorablement connues des services de police, c'est qu'elles
sont connues de certains policiers.
Par ailleurs, un scooter volé présente des indices matériels le suggérant (sauf si les voleurs en possedent les clefs).
Ensuite, si d'instinct des policiers estiment qu'un véhicule est suspect, il est de bon sens qu'ils le contrôlent. Et si le scooter est, au final, volé, c'est que leur flair mérite félicitations et non réprobation. Ainsi lorsque Sebastien Roché parle d'un manque de discernement, il semble qu'il en soit l'exemple lui-même, recommandant que des policiers laissent passer devant leur nez des véhicules volés, passifs, le type d'attitudes qui ont fait germé l'extrême droite jusqu'en 2001.



On note que Mucchielli est opposé à la poursuite d'individus suspect, s'appuyant sur les propos de Moreas, précisant bien son grade de commissaire principal, n'évoquant par contre par sa méconnaissance manifeste du métier de policier de voie publique.




Le reste de le l'article mérite lecture. Même s'il est évidemment orienté (et cite des auteurs eux-même loin de toute neutralité), il témoigne du manque de clarté de définition du rôle des polices municipales sur lequel je posais un regard critique déjà en 2007 : <lien>

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